Le projet Chatounets : les difficultés alimentaires

Le projet Chatounets : les difficultés alimentaires
Le projet Chatounets : les difficultés alimentaires

Beaucoup d’enfants et d’adultes autistes rencontrent des difficultés alimentaires liées aux troubles de l’oralité. Ils ont souvent pour origine une sensibilité particulière aux textures, aux odeurs ou aux couleurs. Elle peut entrainer :

  • Quantités alimentaires insuffisantes
  • Nausées et/ou vomissements
  • Lenteur de la prise alimentaire
  • Absence de plaisir
  • Hypersensibilité de la bouche et des lèvres
  • Refus des aliments nouveaux
  • Refus des morceaux
  • Troubles de la déglutition.

Les repas peuvent rapidement se transformer en parcours du combattant aussi bien pour la personne concernée que pour son entourage. Les troubles de l’oralité peuvent occasionner une forme d’anorexie si la personne s’alimente trop peu.

Il est possible de travailler sur les troubles de l’oralité pour les réduire avec un orthophoniste ou un psychologue spécialisé dans ce domaine.




Les péripéties d’Alice

Les personnes autistes ont des difficultés à trouver le sommeil et à le conserver. Cette problématique est au coeur des préoccupations des personnes autistes et de leur famille, pourtant elle a été jusque là peu étudiée comparativement à d’autres pathologies associées.

Selon une étude de Goldman S.E. (et al. Dev. Neuropsychol.), 44 à 86 % des enfants autistes ont des troubles du sommeil contre 10 à 16 % dans la population normale. Les personnes autistes sont sujettes aux insomnies, il leur faut en moyenne 11 minutes de plus que les personnes non autistes pour s’endormir, et beaucoup d’entre-elles se réveillent fréquemment et à plusieurs reprises durant la nuit.

Le manque de sommeil a des conséquences directes sur les personnes autistes et notamment sur leurs capacités sociales. Les enfants autistes qui souffrent de troubles du sommeil ont plus de comportements stéréotypés et performent moins bien aux tests d’intelligence. Ils ont également plus de difficultés à se concentrer.

Les péripéties d'Alice : une nuit d'insomnie
Les péripéties d’Alice : une nuit d’insomnie

Les péripéties d'Alice : une nuit d'insomnie
Les péripéties d’Alice : une nuit d’insomnie

 

 




Le risque de suicide chez les personnes autistes

Le risque de suicide chez les personnes autistes est plus important que dans la population générale.

Les chiffres concernant le risque de suicide chez les personnes autistes varient dans une proportion très importante selon les études. Cependant, toutes semblent pointer le fait que le risque de suicide est plus élevé chez les personnes autistes. Une étude suédoise de 2015 intitulée National Patient Registry montre que le risque de suicide chez les personnes autistes est 10 fois plus élevé que dans la population générale. Les femmes autistes sont particulièrement touchées par ce risque.
Une étude intitulée Suicidal ideation and suicide plans or attempts in adults with Asperger’s syndrome attending a specialist diagnostic clinic: a clinical cohort study parue en 2014 montre que deux personnes autistes sur trois ont déclaré avoir eu l’envie de se suicider dans leur vie.

 

Déceler les signes de suicide chez les personnes autistes

Le problème est que même quand les signes sont apparents, les cliniciens peuvent les rejeter. Ils restent souvent fixés sur des préjugés concernant le rapport que les personnes autistes ont avec leurs émotions et pensent à tort qu’elles n’ont pas de sentiments complexes ou qu’elles ne sont pas connectées à leurs émotions. Elles ont simplement souvent une manière différente de les exprimer ou n’arrivent pas à les exprimer.
Les cliniciens se trompent aussi sur l’interprétation de l’automutilation qui est un signe d’alerte de risque de suicide reconnu dans la population générale. Pour les personnes autistes, cela est considéré comme un comportement lié à l’autisme.
D’autres signes avant-coureurs peuvent être manqués, car ce sont des éléments de fonctionnement qui diffèrent déjà chez les personnes autistes, comme les troubles du sommeil, la perte d’appétit, ou l’isolement social. Cela rend donc les signes de suicide plus difficiles à interpréter chez les personnes autistes.

 

Les facteurs aggravants les risques de suicide chez les personnes autistes

Les adolescents qui ont des troubles de la communication sociale ont deux fois plus de chance que leurs pairs de se faire du mal avec des intentions suicidaires.
Le travail récent de Culpin I. et al. (J. Am. Acad. Child Adolesc. Psychiatry 57, 313-320, 2018) est l’un des premiers à étudier les relations entre les traits autistiques et les comportements suicidaires chez les personnes autistes.
Les résultats suggèrent également que les problèmes de communication sociale accélèrent la dépression qui mène elle-même à des pensées ou des comportements suicidaires.

Il est bien connu que la dépression est associée au suicide. La surprise pour moi était que cela n’explique qu’une partie de l’association, alors il y a certainement d’autres médiateurs potentiels en dehors

 

dit Dheeraj Rai, chercheur principal et maitre de conférence confirmé en psychiatrie à l’université de Bristol, en Angleterre.
Par exemple le harcèlement et un faible contrôle des émotions peuvent aussi contribuer à un risque élevé de comportements suicidaires chez les adolescents avec des difficultés sociales.
Cette étude n’a pas trouvé de lien direct entre les comportements suicidaires et l’autisme. L’échantillon incluait seulement 42 adolescents autistes. C’est trop peu pour en extraire des conclusions significatives.
Néanmoins, cela montre que le suicide et l’automutilation sont communs chez les personnes autistes. Elles ont en effet moins de réseaux sociaux et luttent pour se connecter aux autres. Cela exacerbe le risque de comportements suicidaires chez les personnes autistes.
Le message fort qui est passé par cette étude est la nécessité de détecter les signes de dépression et de risque de comportements suicidaires chez les personnes autistes. Il semblerait que ces difficultés soient plus fréquentes chez les adolescents autistes.

 

Des résultats inquiétants

 

Rai et ses collègues ont analysé les questionnaires remplis par les parents pour 5031 enfants autistes dans le cadre de l’étude Avon Longitudinal Study of Parents and Children. L’étude a suivi des milliers de femmes et leurs enfants en Angleterre pour enquêter sur les influences génétiques et environnementales sur le développement.
Les parents ont aussi complété un questionnaire permettant d’évaluer les traits autistiques (communication sociale, compétences sociales et comportements répétitifs et restreints) à différents âges des enfants.
Les chercheurs ont considéré que les 10 % d’enfants qui avaient les scores les plus élevés aux trois caractéristiques étaient considérés comme à “haut risque” pour un diagnostic d’autisme et les autres 90 % des enfants comme étant à « faible risque » pour un diagnostic d’autisme.
Quand les enfants ont eu 12 ans, ils ont complété une enquête sur la dépression. À l’âge de 16 ans, ils ont répondu à des questions concernant le suicide, par exemple de savoir s’ils se sont déjà blessés dans le but de se tuer.
L’analyse de cette enquête montre qu’il y a une part égale des deux groupes (ceux classés à « haut risque » pour un diagnostic d’autisme et ceux classés à « faible risque »), environ 11 %, qui font de l’automutilation sans intention de se suicider. Par contre, 12.5 % du groupe classé à « haut risque » ont déclaré s’être blessés avec l’intention de se suicider, contre seulement 6 % du groupe à « faible risque ».

Ce sont des résultats tout à fait inquiétants, vraiment (…) il n’y a pas d’étape intermédiaire. C’est plus une tentative active de mourir

 

dit Emily Taylor, conférencière en psychologie Clinique à l’université d’Edinburgh en Écosse, qui n’était pas impliquée dans la recherche.
La recherché n’a trouvé aucun lien entre les autres traits autistiques et les pensées suicidaires.

 


Sources :
Social problems common in autism raise risk of suicidal behavior, Hannah Furfaro, Spectrum News, juillet 2018




Le projet Chatounets : ces vérités qu’il faut taire

Le projet Chatounets : manque de tact social

Les personnes autistes ne savent pas toujours ce qu’il convient de dire selon les circonstances. Elles peuvent complètement ignorer qu’une parole qu’elles prononcent est socialement inadaptée au contexte. Elles peuvent parfois, dire simplement une vérité, sans se rendre qu’elle est blessante pour la personne qui la reçoit ou ne pas comprendre le sens ni les intentions d’un mensonge .

Certaines personnes autistes ont des difficultés ou ne souhaitent pas  mentir. Cela peut provoquer des tensions avec les personnes non autistes qui n’ont pas l’habitude d’être face à des gens dont la parole peut sembler directe. Les non autistes fonctionnent beaucoup avec des sous entendus ou des expressions au second degrés. Il peut résulter de ces deux modes de communication différents, des quiproquos, des conflits et de l’incompréhension.




Les mutations liées à l’autisme modifient l’équilibre des bactéries intestinales

Ce texte est la traduction d’un article paru dans Spectrum News « Autism mutation alters balance of gut bacteria in mice », Jessica Wright, juin 2018

Une nouvelle étude (1) montre que les souris avec une mutation dans un gène de l’autisme supérieur appelé SHANK 3 ont un niveau élevé d’altération de certaines bactéries intestinales.

Nourrir les souris avec Lactobacillus reuteri, un microbe trouvé dans le yaourt et les probiotiques (note personnelle extraite de wikipédia : les probiotiques sont des micro-organismes vivants, bactéries ou levures, qui, ajoutés comme compléments à certains produits alimentaires comme les yaourts ou les céréales, et ingérés en quantité adéquate, sont censés conférer un bénéfice en matière de santé à l’hôte sain) soulage certains de leurs problèmes.

Les premières preuves suggèrent que les personnes autistes ont aussi un microbiote intestinal modifié – la collection de bactéries dans leurs intestins. Une petite étude publiée l’année dernière fait allusion au fait que l’utilisation d’une transplantation de bactérie chez les enfants autistes peut soulager leurs malaises digestifs  et même leurs difficultés sociales.

Les nouveaux résultats offrent des preuves toutes fraiches pour soutenir cette idée. Ils révèlent aussi une connexion entre les gènes de l’autisme et la flore intestinale.

Je pense que c’est important de prendre du recul et de regarder comment la génétique de l’autisme elle-même pourrait peut-être changer le microbiote

 

dit le chercheur en chef Evan Elliott, professeur assistant en neurosciences comportementales et moléculaires à l’université de Bar-Ilan en Israël.

Le travail fait aussi allusion à une explication de la manière dont les bactéries affectent le comportement : au travers d’un message chimique appelé acide gamma-aminobutyric (GABA)

L’étude est remarquable, car elle lie les facteurs génétiques et environnementaux de l’autisme, dit Sarkis Mazmanian, professeur de microbiologie à l’Institut Californien de Technologie à Pasadena, qui n’était pas impliqué dans l’étude.

 

Le repas microbien

La mutation SHANK3 est présente chez environ 2 % des personnes autistes. Elliott et ses collègues ont observé les échantillons de selles de 31 souris avec une mutation SHANK3 et 27 souris contrôles.

Les chercheurs ont découvert que les souris mutantes avaient une diversité moins importante dans leur microbiote que celles de l’échantillon contrôle.

Certaines souris avaient une absence complète de certaines espèces de bactéries, et un niveau plus faible d’autres bactéries, incluant L. reuteri.  Les niveaux de deux espèces de bactéries, provenant du gène Veillonella, sont aussi anormalement bas chez les femelles mutantes, et une d’elles est anormalement abondante chez les mâles mutants.

Une étude de 2016 a trouvé que L. reuteri restaure le comportement social chez les souris nées avec un microbiote déséquilibré.

Dans la nouvelle étude, L. reuteri stimule également l’intérêt des souris mâles – mais pas l’intérêt des femelles, auprès des autres souris

Nourrir les souris mutantes avec la bactérie diminue aussi le nombre de billes qu’elles enterrent – un test des comportements répétitifs et restreints des souris.

Pour autant, la pertinence de ces résultats pour les personnes autistes n’est pas claire, dit Jil Silverman, professeure associée de psychiatrie et de sciences du comportement à l’université de Californie, au David MIND Institute, qui n’était pas impliquée dans la recherche. Les mutants sont généralement lents, ce qui peut fausser les résultats des tests, dit-elle.

La recherche est parue le 19 mai dans Brain Behavior and Immunity.

 

Une connexion chimique

Les chercheurs ont aussi enquêté sur la manière dont la bactérie pourrait affecter le comportement. Une étude de 2011 a signalé que nourrir les souris avec une autre espèce de Lactobacillus modifie dans le cerveau l’expression du récepteur pour GABA2 (2). La bactérie sécrète des molécules grasses avec une structure chimique similaire à celle de GABA, et cela peut modifier l’expression des récepteurs au travers une boucle de retour, dit Elliott.

L’équipe d’Elliott a exploré plus loin les connexions GABA, mesurant les niveaux de L. reuteri et l’expression des récepteurs GABA du cerveau chez les mutants.

Ils ont découvert que les niveaux de bactéries intestinales suivaient ceux de trois types de récepteurs GABA dans le cerveau. Nourrir les souris avec L. reuteri augmente l’expression de l’ensemble des trois types de récepteurs.

SHANK3 est exprimé dans les neurones de l’intestin et pourrait altérer le microbiome au travers de ces neurones, dit Elliott. Alternativement, cela peut modifier les niveaux de certaines hormones qui affectent l’intestin.

Elliott et ses collègues évaluent la diversité microbienne dans les intestins des personnes autistes qui portaient certaines mutations.

 

REFERENCES:

  1. Tabouy L. et al. Brain Behav. Immun. Epub ahead of print (2018) PubMed
  2. Bravo J.A. et al. Proc. Natl. Acad. Sci. USA 108, 16050-16055 (2011) PubMed



Le harcèlement chez les personnes autistes : le cas des étudiants universitaires

Un grand merci à Céline Pagan qui a accepté de mettre « Squeletto » au service de l’illustration de cet article qui aborde le sujet du harcèlement chez les personnes autistes. Céline Pagan est une personne autiste, artiste, à l’univers bien marqué qui lui a valu la mention « pour le caractère et la personnalité de ses dessins » à l’école Emile-Cohl où elle a étudié. Dessinatrice, peintre et professeur de dessin, elle explore au travers de ses œuvres des thématiques comme le syndrome d’Asperger au féminin ou les animaux. Vous pouvez retrouver quelques-unes de ses créations sur son site internet

Cet article est un résumé de l’étude suivante « Brief Report: Bullying and Anxiety in High-Functioning Adolescents with ASD » Gerrit van Schalkwyk, Isaac C. Smith, Wendy K. Silverman, Fred R. Volkmar publiée en mai 2018 dans le Journal of Autism and Developmental Disorders.

Des recherches récentes soulignent une forte prévalence du harcèlement chez les personnes autistes.

 

 

État des lieux sur le harcèlement chez les personnes autistes

Une étude menée par Sterzing et al. 2012 a analysé le taux de harcèlement chez les personnes autistes dans un échantillon de 900 parents de jeunes autistes âgés de 13 à 16 ans. Un taux de 46.3 % de jeunes victimes de harcèlement a été trouvé, il est significativement supérieur à celui trouvé dans la population générale des adolescents qui s’élève à 10.6 % (Nansel et al. 2001). Une étude de Cappadocia et al. 2012 qui porte sur un échantillon de 192 parents de jeunes autistes âgés de 5 à 21 ans montre que 54 % des situations de harcèlement durent plus d’un an. Les jeunes avec des traits autistiques moyens à élevés ont plus de chance de se faire harceler que les jeunes qui ont des traits autistiques plus faibles et/ou moins visibles (Zablotsky et al. 2014).

Dans une étude de Weiss et al. Publiée en 2015 qui porte sur 101 mères d’adolescents autistes âgés de 12 à 21 ans, 36 % déclarent que leur enfant se fait harceler deux fois par semaine ou plus. Cette étude montre aussi qu’il y a une corrélation entre le harcèlement et la sévérité des symptômes de l’anxiété. Les jeunes qui ont subi du harcèlement ont plus de chance de développer un trouble anxieux à l’âge adulte (Sourander et al. 2007).

Si les données montrent que les enfants autistes sont plus susceptibles d’être victime de harcèlement que les enfants de la population générale, il n’existe à ce jour aucune donnée concernant les jeunes adultes autistes qui entrent à l’université.

Pourtant c’est une période marquée par des changements importants, comme l’apparition de cours magistraux en amphithéâtre qui réunissent un nombre plus conséquent de personnes, une augmentation des demandes sociales ou un changement de domicile avec parfois une première expérience de vie quotidienne seul en dehors de la famille.

Au vu de ces changements, beaucoup d’étudiants autistes ont besoin d’un soutien psychologique et d’une attention clinique soutenue (Adreon and Durocher 2007; Brown et al. 2012; van Schalkwyk et al. 2016; Wolf et al.2009). Dans ce cadre et afin de proposer un accompagnement psychologique mieux adapté il est important de savoir si les étudiants subissent du harcèlement, car cela peut réduire leur chance de réussite à l’université.

Les premiers travaux ont surtout exploré la perspective des parents (Weiss et al. 2015; Zablotsky et al. 2014), mais il serait intéressant à l’avenir de recueillir aussi le point de vue des enfants et adolescents eux-mêmes et de voir si celui-ci diffère des éléments rapportés par les parents.

L’objectif de cette étude est d’évaluer le taux de harcèlement chez les personnes autistes et en particulier les étudiants, le niveau d’anxiété et les caractéristiques de l’autisme sur un échantillon d’étudiants universitaires autistes et d’examiner les liens entre ces trois éléments. Dans cette étude les parents et les individus autistes eux-mêmes seront interrogés afin de s’éloigner des protocoles de recherche qui jusque-là interrogeaient uniquement les parents.

 

Méthode de l’enquête portant sur le harcèlement chez les personnes autistes

Une conférence a été donnée au Yale Child Study Center en avril 2015 sur la thématique de la préparation du passage à l’université pour les étudiants autistes. Un courrier a été envoyé par la suite aux familles concernées et un échantillon de 35 familles a ainsi pu être déterminé. Tous les étudiants concernés ont eu un diagnostic d’autisme selon les DSM-4 ou le DSM-5.

Le protocole de recherche a été établi comme suit :

  •  Un parent de chaque participant a fourni des informations démographiques sur l’étudiant concerné et a complété la version parentale du Multidimensional Anxiety Scale for Children 2 (MASC/P-2, échelle qui mesure l’anxiété) et du Social Responsiveness Scale  (SRS-2, échelle qui mesure les difficultés sociales liées à l’autisme). Ils ont également répondu à des questions pour savoir si leur enfant était concerné par le harcèlement.
  •  Les étudiants ont complété la version adolescente du MASC/C-2 et leur expérience en matière de harcèlement a été évaluée en utilisant un outil appelé My Life in School questionnaire (MLS; Sharp et al. 1994)

Les données ont été analysées en utilisant un outil statistique appelé SPSS Statistics Version 22 (IBM) qui calcule les déviations standards pour les échelles et les sous-échelles. Les corrélations sont calculées entre les données rapportées par les parents et les étudiants concernant le harcèlement et l’anxiété.

 

Dessin de Céline Pagan

Résultats de l’enquête sur le harcèlement chez les étudiants autistes

Concernant le harcèlement, 31 % des parents rapportent que leur enfant en a été victime dans le mois passé contre 51 % des étudiants eux-mêmes. Le score moyen des symptômes de l’anxiété évalué par le MASC-2 était de 54.5 pour les parents et de 56.4 pour les étudiants. Le score moyen obtenu à l’échelle de mesure des difficultés sociales est de 87.8 et aucune différence de genre n’a été identifiée concernant ce score. L’échantillon comprend 23 hommes et 11 femmes et une personne ayant une autre identification de genre.

Cette étude montre que le harcèlement reste un problème majeur pour les adolescents (51 %) lorsqu’on les interroge.

Une étude de Eslea and Rees 2001 montre que chez les adolescents non autistes, le harcèlement intervient surtout au début de l’adolescence, alors que pour les adolescents autistes le harcèlement est encore valable à la fin de l’adolescence, comme le montre une étude de Sterzing et al. 2012 et cela est d’autant plus vrai pour les adolescents autistes avec le moins de compétences sociales.

Cette étude est la première à analyser le harcèlement chez les jeunes adultes autistes à haut niveau de fonctionnement et les résultats rejoignent ceux de Sterling et al.

Les chercheurs ont aussi identifié un taux plus important de harcèlement chez les étudiants qui étaient les plus anxieux socialement. L’étude a permis de déterminer un lien de corrélation entre le harcèlement et l’anxiété sociale. Cela laisse supposer qu’une forte anxiété sociale peut augmenter le risque de harcèlement chez les personnes autistes, ou même que l’intimidation peut aggraver l’anxiété sociale. Le traitement de l’anxiété sociale pourrait donc avoir des avantages en terme de réduction du harcèlement chez les personnes autistes en plus de son objectif principal de réduire les symptômes anxieux.

Une part conséquente de la littérature qui s’intéresse au traitement de l’anxiété chez les jeunes autistes a mis en avant l’efficacité des thérapies cognitivo-comportementales (Lang et al. 2010; White et al. 2010; Wood et al. 2009).

Il est intéressant de constater aussi que dans cette étude, le taux de harcèlement rapporté par les parents et celui rapporté par les étudiants ne sont pas corrélés alors qu’il y a par exemple corrélation par rapport au niveau d’anxiété rapporté par les deux groupes. Plusieurs hypothèses sont envisagées par les chercheurs :

– les étudiants ont rapporté des types de harcèlement moins connus par les parents comme le cyber-harcèlement

– les étudiants étant en train de traverser une période de transition impliquant parfois un éloignement du domicile familial, sont moins enclins à parler à leurs parents des situations de harcèlement qu’ils peuvent vivre.

Cette dernière hypothèse montre bien l’importance qu’il existe à interroger directement les jeunes concernés et non pas que les parents, car cela pourrait entrainer une estimation faussée à la baisse des cas de harcèlement chez les enfants ou les jeunes adultes.

 

Les limites de l’étude

Cette étude sur le harcèlement chez les personnes autistes, en particulier chez les étudiants,comporte plusieurs limites :

  •  la faible taille de l’échantillon (35 personnes)
  • l’influence sur les résultats du fait que l’anxiété soit une comorbidité courante de l’autisme (avec un taux de 50% selon White et al. 2009).
  •  le test de mesure de l’anxiété (MASC) n’est pas spécifique aux personnes autistes et il pourrait fonctionner différemment chez les personnes autistes par rapport à la population générale selon une étude de White et al. 2015

Néanmoins cette étude est la première à mettre en avant la persistance du risque de harcèlement chez les adolescents plus âgés et elle devrait être répliquée afin de voir si les résultats sont les mêmes. L’objectif étant d’agir sur la prévention et l’accompagnement du harcèlement chez les personnes autistes avec une attention spécifique pour les jeunes adultes.

 


Source :

« Brief Report: Bullying and Anxiety in High-Functioning Adolescents with ASD » Gerrit van Schalkwyk, Isaac C. Smith, Wendy K. Silverman, Fred R. Volkmar publiée en mai 2018 dans le Journal of Autism and Developmental Disorders.




L’autisme et les allergies chez les enfants

Les allergies alimentaires sont plus de deux fois plus élevées chez les enfants autistes que parmi leurs pairs typiques.

Ces résultats apparaissent au sein d’une plus vaste étude visant à analyser le lien entre l’autisme et une réponse immunitaire anormale. Par exemple, les femmes avec une condition immunitaire particulière ou une maladie auto-immune telle qu’un lupus, une arthrite rhumatoïde sont plus susceptibles que les femmes sans ces conditions d’avoir un enfant autiste.

Jusque-là peu d’études ont analysé directement le lien entre l’autisme et les allergies. Le nouveau travail basé sur les réponses apportées par les parents de presque 200 000 enfants est la première étude de cette ampleur à trouver ce lien.

C’est une des premières enquêtes à identifier une connexion suggérant qu’il peut y avoir quelque chose lié à l’autisme que nous n’avons pas encore regardé auparavant – et que cette nourriture peut jouer un rôle crucial

 

Dit Linda Snetselaar, professeure d’épidémiologie à l’université d’Iowa. Cependant, les chercheurs ne suggèrent pas que l’autisme cause les allergies alimentaires. La nature du lien entre l’autisme et  les allergies alimentaires n’est pas définie.

Certains chercheurs mettent en garde contre les conclusions de cette enquête, car elle est basée sur un questionnaire rempli par des parents et ne s’appuie pas sur les diagnostics de professionnels.

Les chercheurs ont examiné les réponses des parents qui ont complété le National Health Interview Survey de 1997 à 2016. Cette enquête est une étude fédérale sur la santé des enfants et des adultes aux États unis.

Les parents de 199 520 enfants âgés de 3 à 17 ans ont répondu à des questions concernant des allergies dermatologiques, respiratoires ou alimentaires durant l’année passée. Parmi ces enfants, 1868 sont autistes (1478 garçons et 390 filles).

Au sein de l’échantillon des enfants autistes, 11.25 % ont une allergie alimentaire contre 4.25 % des enfants typiques. Environ 17 % des enfants autistes ont de l’eczéma ou une allergie de peau, comparé à 10 % des enfants typiques.

Les chercheurs n’ont pas trouvé de lien entre l’autisme et les allergies chez les filles, mais cela s’explique sans doute par le fait qu’il y ait un échantillon trop faible de filles.

Les résultats montrent une relation entre l’autisme et les allergies, ils ne suggèrent pas que les allergies augmentent le risque d’autisme ou l’inverse. L. Snetselaar explique que :

C’est très important de ne pas se concentrer sur la causalité, mais plutôt de voir qu’il y a un chemin vers des recherches additionnelles futures

 

Une des possibilités est que l’autisme et les allergies partagent des racines communes.

Par exemple, une sorte de particularité génétique commune qui sous-tend à la fois des irrégularités immunitaires à la naissance et des troubles neurodévelopementaux ou du comportement

 

Dit Lisa Croen, directrice du  Autism Research Program dans un centre de soins basé en Californie. Elle n’était pas impliquée dans l’étude.

L’étude a d’autres limites comme de se baser sur la mémoire que les parents ont des allergies de leur enfant, ce qui peut manquer d’exactitude. Et certaines différences dans les diagnostics d’allergies peuvent s’expliquer par le fait que les enfants autistes voient plus souvent les médecins que les enfants typiques, ils ont donc plus de chance de se faire dépister leurs allergies.

 


Source :

Autistic children prone to food, skin and respiratory allergies,Hannah Furfaro, Spectrum News, Juillet 2018

 




Le projet Chatounets : les expressions du visage

Le projet Chatounets : les expressions du visage
Le projet Chatounets : les expressions du visage

Parmi les troubles de la communication qui sont reconnus dans les critères de diagnostic, on retrouve la catégorie des comportements non verbaux. Ils regroupent tout ce qui n’appartient pas au langage parlé/verbal : les gestes, l’intonation, le regard, les expressions du visage… C’est ce dernier point qui est développé dans la petite BD ci-dessous.

Les expressions du visage peuvent être incohérentes avec la situation (sourire lorsqu’une personne pleure), elles peuvent être atténuées ou inexistantes (donner l’impression que le visage est figé comme déconnecté du contexte) ou au contraire les expressions peuvent être exagérées (faire les gros yeux en mettant les mains devant la bouche comme si on avait commis un énorme impair alors que l’on a simplement fait tomber un papier sans importance, rire trop fort en exagérant les contour de la bouche…).

Accorder les expressions du visage avec son propre état émotionnel ou celui d’autrui ainsi que l’adapter à l’environnement demande souvent un effort conscient pour les personnes autistes, là où les personnes non-autistes font appel à des compétences qui sont innées. Les personnes autistes doivent « mettre » une expression sur leur visage.

 

 

Le projet Chatounets : les expressions du visage 1
Le projet Chatounets : les expressions du visage 1

Le projet Chatounets : les expressions du visage 2
Le projet Chatounets : les expressions du visage 2




Les liens entre l’autisme et l’épilepsie

Abigail a été récemment diagnostiquée autiste avec une déficience intellectuelle. Elle fait aussi souvent des crises d’épilepsie. Cela a mis plus de 20 ans pour obtenir ces diagnostics.

En 2013, Meena Balasubramanianle, médecin d’Abigail lui propose de participer à une étude intitulée Deciphering Developmental Disorders (DDD), une étude durant laquelle les chercheurs séquencent les gènes d’un individu pour trouver la cause de maladies génétiques non diagnostiquées.

Pour Abigail, ils trouvent une mutation de nuovo dans un gène connu pour être à la source de l’épilepsie : le gène HNRNPU. Gillian, la mère d’Abigail a eu les résultats seulement l’année dernière.

Durant les dernières années, ce gène a aussi été étudié comme pouvant être impliqué dans les causes de l’autisme associé à un trouble neurodéveloppemental.

Trouver la cause génétique de la condition d’Abigail a éveillé l’intérêt de M. Balasubramanian pour ce gène.

Elle a depuis collecté les informations de 6 autres personnes porteuses de cette mutation. Ces participants partagent les difficultés d’apprentissage et les crises d’Abigail.

A l’aide d’une autre équipe de recherche, M. Balasubramanian a analysé les données génétiques de 11 personnes. Les résultats suggèrent que la mutation de ce gène HNRNPU entraine une déficience intellectuelle, des crises d’épilepsie, des traits faciaux distinctifs et l’autisme dans certains cas.

Une cinquième étude a été menée et a trouvé cette mutation dans certaines cellules de personnes autistes.

  1. Balasubramanian a identifié 23 personnes supplémentaires porteuses de la mutation HNRNPU depuis que son étude a été publiée. Elle collabore actuellement avec des chercheurs en France et aux États-Unis qui ont identifié d’autres personnes avec cette mutation.

 

Ces études ont porté ce gène à l’attention des généticiens, notamment Evan Eichler et ses collègues de l’université de Washington à Seattle. Lui, et son équipe ont assemblé des données de séquençage  de plus de 11000 personnes avec une condition neurodévelopementale. Au début de cette année, ils ont remarqué que 11 d’entre eux avaient une mutation dans le gène HNRNPU et 8 étaient également identifiés par l’étude du DDD.

La prochaine étape pour ce domaine de recherche est de définir les caractéristiques physiques associées aux mutations de l’autisme, dit Raphael Bernier un professeur de psychiatrie et de sciences comportementales à l’université de Washington.

L’équipe de Eichler a aussi recherché comment la mutation du gène HNRNPU contribue à l’autisme. Le gène HNRNPU est impliqué dans le traitement des messages d’ARN qui codent les protéines; d’autres gènes de la même famille peuvent également être impliqués dans l’autisme.

Parmi les 25 autres personnes qui ont cette mutation, 5 ont un diagnostic d’autisme. La plupart d’entre elles ont des caractéristiques autistiques, mais n’ont pas été évaluées de manière formelle.

 

“Mon intuition est que, après avoir parlé à toutes les familles et avoir vu les enfants, je pense que la majorité vont finir par correspondre aux critères de l’autisme”

 

dit Chao. Elle et ses collègues ont prévu d’étudier les souris avec une mutation du gène HNRNPU pour mieux comprendre comment ces mutations mènent à l’autisme et aux autres traits.

 


Sources :

Studies unveil hidden ties between epilepsy gene and autism, Jessica Wright, Spectrum News, juillet 2018




Les liens entre la dysphorie de genre l’autisme

Cet article est un résumé synthétique de l’étude “The Co-occurrence of Gender Dysphoria and Autism Spectrum Disorder in Adults : An Analysis of Cross-Sectional and Clinical Chart Data” par Heylens G, Aspeslagh L, Dierickx J, Baetens K, Van HoordeB, De Cuypere G, Elaut E.,  publiée dans le Jounal of Autism and Developmental Disorders en juin 2018

Note : dans l’article MAB « Male At Birth” désigne une personne dont le sexe d’origine est masculin, mais qui se considère comme une femme, alors que FAB « Female At Birth » désigne une personne dont le sexe d’origine est féminin, mais qui se considère plus comme un homme.

Quelques éléments introductifs sur la dysphorie de genre et l’autisme

La dysphorie de genre est définie dans le DSM-5 comme une détresse résultant de l’incongruence entre le genre expérimenté et le genre assigné avec une volonté forte et persistante d’être d’un autre genre (Association de psychiatrie américaine 2013).

En matière de facteurs étiologiques qu’ils soient génétiques ou non, la dysphorie de genre partage des points communs avec les TSA. Selon la théorie de Simon Baron Cohen (2002) selon laquelle l’autisme est une version extrême du cerveau masculin, l’exposition prénatale à la testostérone peut entraîner une plus grande prédisposition à la dysphorie de genre. Cependant, cette théorie n’explique pas le cas des personnes de genre masculin à la naissance qui souhaitent changer de sexe (van der Miesen et coll. 2016).

En outre, la prévalence de la dysphorie de genre et de l’autisme sont en augmentation (Arcelus et coll. 2015; Lai et coll. 2014), mais il n’y a pas d’étude permettant aujourd’hui de dire si c’est une augmentation réelle du nombre de personnes concernées ou une plus grande visibilité des diagnostics de ces personnes.

Aussi, les études montrent que la dysphorie de genre et l’autisme sont tous les deux plus susceptibles de toucher les hommes que les femmes avec un ratio de 3 à 5 hommes pour une femme dans l’autisme (Lai et coll. 2014) et un ratio MAB pour FAB de 2.6 pour 1 (cela signifie qu’il y a 2.6 personnes nées hommes et se reconnaissant femmes pour une personne née femme et se reconnaissant homme). Il est à préciser que si le sexe-ratio varie selon les études, les résultats convergent vers ceux cités.

La plupart des études sur la co-occurrence entre dysphorie de genre et autisme concernent des études de cas. Les études concernent souvent des enfants ou des adolescents.

Seulement deux études ont documenté le lien entre dysphorie de genre et autisme chez les adultes en utilisant des outils d’évaluation reconnus : Jones et coll. 2012; Pasterski et coll. 2014. Que ce soit chez les enfants, les adolescents et les adultes il semble que la dysphorie de genre apparaisse souvent chez les personnes autistes même si les études diffèrent selon les critères de diagnostic retenus et les critères de sélection de l’échantillon.

Les deux études citées (Jones et coll. 2012 et Pasterski et coll. 2014) ont utilisé le Quotient Autistique, qui est un test élaboré par S. Baron Cohen en 2001 connu pour sa capacité à évaluer les traits autistiques. Jones et coll. ont trouvé une moyenne plus élevée de personnes ayant des traits autistiques dans l’échantillon FAB (n=61) comparativement à celui des hommes typiques (n=76), des femmes typiques (n=98) et des MAB (n=198), mais moins élevés que dans l’échantillon des personnes autistes (n=125).

Pasterski et al. ont trouvé une prévalence de l’autisme de 5.5 % parmi les 91 personnes de leur échantillon présentant une dysphorie de genre.

Cette étude a pour objectif de déterminer la prévalence des traits autistiques et de l’autisme chez les adultes ayant une dysphorie de genre et de comparer ces résultats avec ceux existant dans la littérature scientifique.

La méthode utilisée lors de cette étude et l’échantillon

L’échantillon concerne 532 personnes (MAB n=351, FAB n=181) diagnostiquées avec une dysphorie de genre à l’hôpital de Ghent, dans une clinique spécialisée sur le genre en Belgique.

Trois méthodes ont été utilisées pour repérer les traits autistiques auprès des personnes de l’échantillon. La première a consisté à analyser les éléments présents dans les dossiers médicaux des patients (comme exemple la présence de trouble de la communication, retrait social…). Les personnes de l’échantillon ont été divisées en trois catégories : « sans diagnostic de TSA », « avec un diagnostic probable de TSA » et « avec un diagnostic certain ».

Puis deux tests ont été administrés aux personnes de l’échantillon. Les outils utilisés dans l’étude pour mesurer les traits autistiques des personnes ayant une dysphorie de genre sont les suivants :

  • Social Responsiveness Scale-Adult Version (SRS-A) : C’est un test qui permet d’identifier les difficultés sociales associées à l’autisme et qualifier leur sévérité
  • Le Quotient Autistique : c’est un questionnaire auto-administré qui mesure les traits autistiques dans les domaines suivants : compétences sociales, compétences de communication, imagination, attention, sensibilité aux détails

Les résultats de l’étude : lien entre dysphorie de genre et autisme

Les résultats montrent une sur-représentation des traits autistiques et de l’autisme au sein de la population des personnes concernées par la dysphorie de genre. Pour 27.11 % de l’ensemble de l’échantillon, le score au test SRS-A dépasse le seuil de 60, ce qui signifie que les personnes ont des caractéristiques autistiques modérées à sévères (le score de la population normal étant en dessous de 60). Ce résultat est bien plus élevé que dans la population générale. En revanche, ces résultats ne sont pas comparables à d’autres études, car c’est la première fois que le test SRS-A est utilisé pour détecter les traits autistiques chez des personnes ayant une dysphorie de genre.

5 % de l’échantillon de cette étude à un score dépassant le seuil de 32 au quotient autistique, score à partir duquel un diagnostic d’autisme peut être posé. Ces résultats sont proches de ceux trouvés par Pasterski et coll. dans leur étude de 2014 où le dépassement du seuil de 32 correspondait à 5.5 % de leur échantillon. Dans les deux études, aucune différence n’a été constatée entre les MAB et FAB par rapport à la présence de traits autistiques.

Cette recherche ne confirme donc pas la théorie du cerveau masculin extrême proposée par S. Baron Cohen en 2002. Selon cette théorie, un niveau de testostérone avant la naissance mènerait à une prédisposition de l’autisme et de la dysphorie de genre pour les FAB. Or en 2016, Kung et coll. n’ont pas trouvé de relation entre l’exposition prénatale aux androgènes et les traits autistiques chez les enfants. Ils concluent que l’hypothèse entre une concentration de testostérone prénatale et les traits autistiques ne peut être confirmée, car elle n’est pas assez fiable.

L’étude des dossiers cliniques des patients de l’échantillon montre que 6 % des personnes concernées par la dysphorie de genre entrent dans la catégorie « avec un diagnostic certain de TSA ». Ce taux est plus élevé que dans la population générale et confirme donc les résultats trouvés avec les autres tests SRS-A et Quotient Autistique.

Les limites de l’étude

Une des limites de cette étude est la taille relativement restreinte de l’échantillon pour faire des analyses croisées. Il peut aussi y avoir un manque de fiabilité de l’analyse issue des données des dossiers médicaux concernant les traits autistiques des patients qui résulte de la variété des outils utilisés pour mesurer ces traits.

Une autre limite provient de l’origine même de l’échantillon qui concerne des patients qui se sont rendus à la clinique de l’hôpital de Ghent, spécialisée dans l’accompagnement des personnes qui souhaitent changer de genre. Cela exclut les personnes autistes plus sévèrement touchées ou les personnes avec une dysphorie de genre qui ne vont pas jusqu’au bout de la démarche pour changer de sexe.

Conclusion

Les données collectées dans cette étude révèlent une prévalence de l’autisme six fois plus élevée chez les personnes concernées par la dysphorie de genre. Cela semble donc apparaitre comme une possible pathologie associée à l’autisme. Cela devrait permettre aux cliniciens d’être alertés et de rechercher des caractéristiques de l’autisme chez les personnes ayant une dysphorie de genre et inversement afin de mieux prendre en compte les besoins réels des personnes. Une sous-estimation du lien entre autisme et dysphorie de genre peut mener à des soins et des accompagnements inadaptés mettant en difficulté les personnes concernées par ces deux fonctionnements.

Comme proposé par Miesen et coll. (2016) et van Schalkwyk et coll. (2015) une étude longitudinale menée sur un échantillon plus important de personnes concernées par l’autisme et la dysphorie de genre devrait être menée afin d’améliorer les connaissances scientifiques au sujet des liens l’identité de genre et l’autisme.


Source :

The Co-occurrence of Gender Dysphoria and Autism Spectrum Disorder in Adults : An Analysis of Cross-Sectional and Clinical Chart Data” par Heylens G, Aspeslagh L, Dierickx J, Baetens K, Van HoordeB, De Cuypere G, Elaut E.,  publiée dans le Jounal of Autism and Developmental Disorders en juin 2018