Le coût des stratégies de compensation pour les enfants autistes

Les enfants autistes ont souvent des difficultés pour comprendre les pensées d’autrui, cela s’appelle la théorie de l’esprit. Pour compenser cela ils mettent en place des stratégies de compensation, comme écrire mentalement des dialogues, afin de correspondre aux attentes des situations sociales auxquelles ils doivent faire face. Mais ces stratégies ont un prix. Une étude récente ( Livingston L.A. et al. J. Child Psychol. Psychiatry Epub ahead of print 2018) montre que cela entraine plus d’anxiété chez ces enfants.

Les enfants qui mettent en place ces stratégies de compensation ont plus des résultats plus élevés aux tests d’intelligence verbale et dans les fonctions exécutives.

Les stratégies de compensation sont utiles pour les personnes qui ont de faibles compétences en théorie de l’esprit. La théorie de l’esprit peut se résumer par la capacité à percevoir les désires et les intentions d’autrui.

Lucie Livingston une étudiante diplômée du laboratoire en charge de cette étude dit que :

 We think these people are quite good at compensating for their difficulties with theory of mind, (…) [But] evidence suggests there could potentially be some kind of negative consequence to compensating

Traduction libre : Nous pensons que ces personnes sont assez bon pour  compenser leurs difficultés en théorie de l’esprit (…) mais les preuves suggèrent qu’il pourrait potentiellement y avoir une sorte de conséquence négative à la  compensation »

Les recherches suggèrent que les cliniciens devraient identifier les enfants qui mettent en place ces stratégies afin de leur proposer des thérapies leur permettant d’alléger le niveau l’anxiété.

L’étude dont il est question a inclus 136 enfants autistes ou avec des traits autistiques âgés entre 10 et 15 ans qui font partie d’une plus grande étude intitulée Social Relationships Study au Royaume Unis. Les chercheurs ont évalué les traits autistiques des enfants en ce servant de l’ADOS, une échelle d’évaluation de l’autisme reconnu comme efficiente par les cliniciens.

Les enfants et les parents ont également rempli un questionnaire permettant d’évaluer leur niveau d’anxiété. Ils ont également passé des tests pour évaluer leur intelligence verbale et non verbale, le niveau de théorie de l’esprit et les compétences dans les fonctions exécutives. Environ la moitié des enfants qui ont des difficultés en théorie de l’esprit montrent pourtant de bonnes compétences sociales à l’ADOS. Si ce résultat semble contradictoire à première vue, il signifie en réalité que ces enfants ont réussis à compenser leur difficulté en théorie de l’esprit à un niveau leur permettant de mieux performer dans les compétences sociales évaluées par l’ADOS.

Il est à noter que ces enfants ont en moyenne un score de 93 au QI verbal, soit 9 points de plus que l’ensemble des enfants. Ces enfants ont également un taux d’anxiété plus élevé que les autres enfants. Les chercheurs n’ont trouvé aucune corrélation entre le genre et la mise en place de stratégie de compensation, contrairement à de nombreuses études antérieurs. Cela peut s’expliquer par le très faible nombre de filles dans l’échantillon (112 garçons pour 24 filles).

Les chercheurs ne savent pas à quel point les stratégies de compensation sont une technique répandu chez les personnes autistes, ni qui est plus à même de la mettre en oeuvre.

Ces résultats sont préliminaires et sont uniquement basés sur des observations en laboratoire. Or les stratégies de compensation développées dans la vie réelle peuvent être différentes. Les chercheurs ont donc prévus de poursuivre leur travail en situation réelle comme dans la cour de l’école ou en classe.

Un des objectifs consisterait à mesurer si les personnes autistes considèrent que les avantages sociaux obtenus par la compensation valent le coût par rapport à l’énergie dépensée et l’anxiété mesurée.


Source :

Use of certain social strategies linked to anxiety in autism, Spectrum News, Brianna Abbott, Mai 2018