Une infographie sur les femmes autistes : principales spécificités

Cet article a pour seul objectif d’expliciter l’ infographie sur les femmes autistes réalisée ci-dessous dans le but d’aborder de manière simple, quelques spécificités des femmes autistes.

Avant de voir ce qui diffère entre les hommes et les femmes autistes, il semble important de commencer par rappeler ce qui est commun : les caractéristiques de l’autisme. La dyade autistique définit par les troubles de la communication et des interactions sociales ainsi que les comportements répétitifs et restreints sont des éléments communs aux hommes et aux femmes autistes.

Ce qui diffère, c’est la manière dont certaines de ces caractéristiques s’expriment selon le genre. Cela ne concerne toutefois pas l’ensemble des hommes autistes ou l’ensemble des femmes autistes. Ce sont des tendances générales qui s’expriment davantage dans un genre ou un autre, mais les hommes autistes peuvent très bien se reconnaitre dans le profil féminin et inversement.

J’ajoute également que pour caractériser le profil féminin
de l’autisme, il ne faut pas uniquement faire une comparaison entre hommes et
femmes autistes, mais bien également entre femmes au développement typique et
femmes autistes. Car c’est bien la différence entre la population générale et
un fonctionnement autistique qui est en premier lieu recherchée par les
cliniciens.

Exceptionnellement, les références seront citées à la fin de chaque élément énoncé et non pas en bas de page comme c’est le cas habituellement, et ce dans le seul but de vous en faciliter la compréhension.

Cette infographie sur les femmes autistes n’a pas pour objectif d’être exhaustive de l’ensemble du phénotype autistique féminin, mais d’en présenter quelques caractéristiques principales, fondées sur des études scientifiques.

Une infographie sur les spécificités des femmes autistes

Le sexe ratio dans l’autisme

Si l’on s’intéresse au sex-ratio, les études montrent une prévalence importante du nombre de garçons par rapport aux filles : de 4 à 5 garçons pour une fille dans le DSM 4 et 3 à 4 garçons pour une fille dans la CIM-10. Une étude de 2005 de Fombonne fait état de 4 garçons pour une fille.

Le sex ratio varie peu en cas de déficience intellectuelle moyenne ou profonde, par contre il y a beaucoup plus de garçons chez les personnes autistes sans déficience (5.5 pour 1 à 6.7 pour 1). Les récents témoignages de femmes autistes sans déficience intellectuelle interrogent les chercheurs car chez elles l’expression de l’autisme est plus discrète, elles ont su masquer leurs difficultés et peuvent presque pour certaines, passer inaperçues en société.

Dans cette infographie sur les femmes autistes, j’ai choisi de retenir le sex ratio issu d’une étude de Loomes et al. (2017) et qui fait état de trois garçons pour une fille autiste, car cette étude est récente et semble être largement reprise par la communauté scientifique.

Référence : Loomes, R., Hull, L., & Mandy, W. P. L. (2017). What Is the Male-to-Female Ratio in Autism Spectrum Disorder ? A Systematic Review and Meta-Analysis. Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, 56(6), 466‑474.

Les comorbidités chez les femmes autistes

Selon une étude récente le TDAH, l’anxiété et la dépression sont les trois pathologies associées fréquemment retrouvées chez les femmes autistes : TDAH hommes autistes = 32 %, TDAH femmes autistes = 42.7 %, anxiété chez les hommes autistes = 18 %, anxiété chez les femmes autistes = 25.4 %.

On retrouve les mêmes comorbidités chez les hommes mais quelques différences existent :

  •  pour l’anorexie, beaucoup plus présente chez les femmes autistes : 6.8% dans l’étude citée contre 0% d’hommes autistes
  •  Il y a également une différence au niveau du taux de dépression : 6 % chez les hommes autistes contre 13.5 % chez les femmes autistes.
  •  5 % d’hommes autistes ont des TOC, contre 0 % chez les femmes autistes. 

Référence : Margari L., Palumbi R., Peschechera A., Craig F., De Giambattista C., Ventura P., Margari F. Sex-Gender Comparisons in Comorbidities of Children and Adolescents With High-Functioning Autism Spectrum Disorder, 2019,  Frontiers in Psychiatry,  10 , art. no. 159

La motivation sociale plus importante

La motivation sociale semble être plus importante chez les
femmes autistes par rapport aux hommes autistes, comme le montrent plusieurs
études (Head et al. 2014; Sedgewick et al. 2015).

Si la motivation sociale et l’attention à l’autre sont
présentes chez les femmes autistes en théorie, elles peinent néanmoins dans la
pratique à nouer de véritables relations avec leurs pairs. Cela concerne aussi
bien le fait d’initier la communication que la capacité à maintenir des
relations.

Référence : Sedgewick, F., Hill, V., Yates, R., Pickering, L., & Pellicano, E. (2015). Gender Differences in the Social Motivation and Friendship Experiences of Autistic and Non-autistic Adolescents. Journal of Autism and Developmental Disorders.

Les intérêts spécifiques

Lors de la journée internationale de la recherche sur
l’autisme en 2017, des chercheurs ont présenté une étude une étude basée sur
les enregistrements vidéos des passations de 22 garçons et 22 filles autistes
(test ADOS), tous âgés entre 9 et 15 ans. Ils ont trouvé que les filles
autistes sont plus susceptibles de parler des intérêts spécifiques dans les
relations en particulier avec les animaux. Par contraste les garçons autistes
ont plus d’intérêts non sociaux, comme les puzzles ou les jeux sur ordinateur.
Tony Attwood (2007) a remarqué cette différence de genre dans le choix des
thématiques des intérêts spécifiques des personnes autistes. Les filles ou les
femmes ont souvent un centre d’intérêt qui n’est pas inapproprié à leur âge et
dont le sujet est assez commun, par exemple une fille qui aime les poupées
Barbies. C’est par contre soit l’utilisation des objets ou le temps consacré au
sujet d’intérêt qui vont le faire différer de la norme.

La perception sensorielle

Les études scientifiques ne sont pas des vérités absolues et elles évoluent en fonction des protocoles. Pour la question des perceptions sensorielles, il semblerait que plusieurs études montrent que les filles/femmes autistes ont davantage un profil hypersensible plutôt qu’hyposensible.

C’est notamment le cas pour le sens du touché. Elles seraient aussi plus sensible à la luminosité et les bruits de fond seraient plus difficile à filtrer que pour les hommes autistes.

Référence : Rynkiewicz, Agnieszka & Łucka, Izabela. (2015). Autism spectrum disorder (ASD) in girls. Co-occurring psychopathology. Sex differences in clinical manifestation. Psychiatria Polska. 52. 1-11. 10.12740/PP/OnlineFirst/58837.

La notion de camouflage social

Elle se définit par le fait de masquer/cacher ses traits
autistiques. La notion de camouflage n’est pas l’apanage des femmes. Les hommes
autistes utilisent des stratégies afin de masquer les comportements les plus
embarrassants socialement qui sont liés à l’autisme. Cependant ils y arrivent
généralement avec moins de succès et ce phénomène est plus répandu chez les
femmes.

Le camouflage demande une concentration, un contrôle de soi
et une auto-régulation importante qui consume l’énergie des personnes autistes
et créer une fatigue importante. Le camouflage peut aussi conduire à une baisse
de l’estime de soi, une forte anxiété et une perte d’identité.

Référence : Putting on my best normal, Laura Hull, K. V. Petrides, Carrie Allison, Paula Smith, Simon Baron‑Cohen, Meng‑Chuan Lai3, William Mandy, 2017, Journal of autism and developmental disorders

Les violences sexuelles

Du 23 au 25 Janvier 2019, avait lieu à Paris le 17ème congrès de l’Encéphale réunissant les professionnels de la psychiatrie. A cette occasion le Docteur Gourion y a présenté les résultats d’une enquête par questionnaire montrant que 88 % des femmes autistes déclarent avoir subit une ou plusieurs violences (que ce soit des viols, tentatives de viols, attouchements, baisers non désirés…). 51 % déclarent avoir subit une pénétration sexuelle sous contrainte. 84.5 % des femmes autistes ont déclaré avoir été victimes de plusieurs agressions sexuelles. Dans 47 % des cas, l’âge de la première agression était inférieur à 14 ans.

Référence : https://femmesautistesfrancophones.com/2019/02/09/femmes-autistes-congres-encephale-2019/

Le harcèlement

Malheureusement la question du harcèlement touche aussi bien
les hommes que les femmes. Je n’ai pas connaissance d’étude montrant une
différence de genre à ce niveau. Par contre les études montrent qu’il y a une
proportion plus importante de harcèlement chez les personnes autistes que chez
les personnes non autistes.

Une étude menée par Sterzing et al. 2012 a analysé le taux
de harcèlement chez les personnes autistes dans un échantillon de 900 parents
de jeunes autistes âgés de 13 à 16 ans. Un taux de 46.3 % de jeunes victimes de
harcèlement a été trouvé, il est significativement supérieur à celui trouvé
dans la population générale des adolescents qui s’élève à 10.6 % (Nansel et al.
2001). Une étude de Cappadocia et al. 2012 qui porte sur un échantillon de 192
parents de jeunes autistes âgés de 5 à 21 ans montre que 54 % des situations de
harcèlement durent plus d’un an. Les jeunes avec des traits autistiques moyens
à élevés ont plus de chance de se faire harceler que les jeunes qui ont des
traits autistiques plus faibles et/ou moins visibles (Zablotsky et al. 2014).

Le suicide chez les femmes autistes

Une étude récente s’est intéressée au suicide chez les femmes
autistes.

Dans la population générale, le suicide se produit plus
souvent chez les hommes que chez les femmes, avec un ratio de 3.5 pour 1 (NIMH,
2018) et les femmes ont également tendance à utiliser des méthodes de suicide
moins violentes que les hommes (Ajdacic-Gross et al., 2008).

Entre 2013 et 2017, l’incidence cumulative des décès par
suicide des femmes autistes était de 0.17 % alors qu’elle n’est que de 0.05 %
dans la population générale. Le taux de suicide des femmes autistes est donc
bien beaucoup plus élevé comparativement aux femmes de la population générale.

La méthode de suicide ne diffère pas entre les hommes et
femmes autistes dans cette étude, l’hypothèse 3 selon laquelle les hommes
autistes utiliseraient des méthodes de suicide plus violente n’est donc pas
validée dans cette recherche.

Référence : A 20-Year Study of Suicide Death in a State wide Autism Population, Autism Res. 2019 Jan 21.

Pour conclure j’espère que cette infographie sur les femmes autistes permettra aux professionnels, aux personnes autistes et à leur famille d’avoir un support simple et imagé permettant d’aborder ce sujet et de le vulgariser auprès d’un public non averti.

Vous pouvez retrouver cette infographie sur Pinterest : https://www.pinterest.fr/PhantomAutisme/infographies-sur-lautisme/