Le projet Chatounets : les stéréotypies

Le projet Chatounets : les stéréotypies

Les stéréotypies font parties de la définition de l’autisme et appartiennent à une catégorie de comportements que le DSM-5 qualifie de « comportements répétitifs et restreints ». Selon le DSM, ce sont des modèles de comportements, d’intérêts ou d’activités restreints et répétitifs, tels qu’ils se manifestent par au moins deux des éléments suivants, actuellement ou dans l’enfance :

1. Caractère stéréotypé ou répétitif des mouvements, de l’utilisation des objets ou du langage,

2. Intolérance au changement, adhésion inflexible à des routines ou à des modes comportementaux verbaux ou non verbaux ritualisés,

3. Intérêts extrêmement restreints et fixes, anormaux soit dans leur intensité, soit dans leur but,

4. Hyper ou hyporéactivité aux stimulations sensorielles ou intérêt inhabituel pour les aspects sensoriels de l’environnement.

Berkson définit les stéréotypies selon 5 critères :

  • Comportement volontaire,
  • Manque de variabilité du comportement,
  • Le comportement persiste dans le temps,
  • Le comportement ne change pas selon l’environnement,
  • Il est inhabituel par rapport à l’âge.

Il existe plusieurs sortes de stéréotypies :

  • Les stéréotypies motrices : elles correspondent à des mouvements répétitifs (balancement, flapping,…) ou des maniérismes moteurs (une démarche particulière ou une position du corps inhabituelle)
  • Les stéréotypies liées aux objets : le fait d’utiliser un objet pour une fonction qui n’est pas habituellement la sienne, ou de ne se servir que d’une partie de l’objet (comme ouvrir et fermer une portière d’une petite voiture en jouet). La personne prend souvent l’objet avec elle partout où elle va.
  • Les stéréotypies vocales, aussi appelées écholalies : c’est le fait de répéter un même son ou une même phrase souvent avec la même intonation que le modèle d’origine, comme par exemple une publicité entendue à la radio ou à la télévision
  • Les stéréotypies sensorielles : la recherche de stimulations sensorielles de manière répétée, comme par exemple regarder des lumières vives, rester à côté d’un ventilateur qui fait du bruit

Les stéréotypies ont longtemps été déconsidérées, perçues comme étant un signe extérieur de l’autisme qu’il faudrait supprimer car elles auraient un impacte négatif sur la vie des personnes. Cette analyse ne tient pas compte de la fonction que peuvent avoir les stéréotypies pour les personnes autistes. Ce sont des comportements d’autorégulation qui permettent à la personne autiste de mieux aborder son environnement, notamment lors de moments stressants, elles peuvent aussi servir de moyen de communication. D’une manière plus hédoniste, les stéréotypies peuvent procurer du plaisir aux personnes autistes qui s’y adonnent.

Certaines stéréotypies peuvent devenir trop envahissantes dans la vie des personnes et gêner les apprentissages ou les actes de vie quotidienne, comme se nourrir. Dans ce cas et selon les principes de l’analyse fonctionnelle, il convient de proposer à la personne un autre comportement alternatif qui permette de remplacer la fonction initiale de la stéréotypie pour la personne. Il est déconseillé de simplement supprimer la stéréotypie envahissante car elle a une fonction et c’est donc un besoin pour la personne. Une suppression nette peut entraîner des comportements défis encore plus conséquents pour la personne et son entourage.


Sources :

Reconsidérer les comportements répétitifs au sein de l’autisme 

Priscille MAROT, Mémoire en vue de l’obtention du Diplôme d’État de Psychomotricien, Analyse fonctionnelle des stéréotypies d’un enfant porteur d’un Trouble du Spectre Autistique




La résistance aux changements

Beaucoup de personnes autistes ont une résistance aux changements, éprouvent des difficultés lors de certains types de changements ou ont des rigidités de fonctionnement.

Le projet Chatounets : la résistance aux changements

Cette résistance aux changements fait partie des caractéristiques de l’autisme, elle est classée dans les comportements répétitifs et restreints, qui sont un critère de diagnostic de l’autisme.

Ce schéma illustre les différentes catégories de comportements répétitifs et restreints.

Selon Peter Vermeulen, cette résistance aux changements est liée au fait que les personnes autistes perçoivent le monde comme chaotique et désorganisé à cause du mode de traitement de l’information de leur cerveau. Ainsi, ils sont à la recherche de règles et de scriptes pour établir des repères.

Les personnes autistes s’attachent surtout aux routines qu’elles ont crées elles-mêmes ou qui les concernent directement et peuvent être moins sensibles lorsque ce sont les autres qui changent leurs habitudes.

Afin de mettre de l’ordre dans le monde qui les entoure, les personnes autistes peuvent créer des routines par association. Par exemple, s’asseoir toujours à la même place pour manger ou aller boire un café tous les lundis après le travail. Ces règles deviennent des routines rassurantes et c’est lorsque celles-ci ne peuvent être mises en place que la résistance aux changements et les rigidités prennent de l’ampleur.

Au final, toutes les personnes, autistes ou non autistes créent des rituels pour rythmer leur vie. Mais chez les personnes autistes, ceux-ci occupent une place plus importante et les conséquences en cas d’impossibilité à les maintenir sont plus visibles que chez les personnes non autistes.

Selon les personnes, la résistance aux changements peut se manifester de plusieurs manières :

  • questions incessantes sur les raisons du changement
  • protestations
  • anxiété pouvant aller jusqu’à la crise d’angoisse
  • agressivité/colère

Les changements sont une vraie menace pour les personnes atteintes d’autisme, si rien ne se passe comme prévu ou comme leurs règles et leurs scriptes l’exigent, elles se sentent profondément déstabilisées et sont mal à l’aise

Peter Vermeulen

Il est a noté toutefois qu’en matière d’autisme aucun comportement ne saurait s’appliquer à toutes les personnes autistes de la même manière. Ainsi, certaines personnes autistes apprécient le changement (faire une nouvelle activité, réorganiser l’agencement des meubles…), mais c’est plus souvent le cas lorsque celui-ci est initié par elles.


 Comprendre les personnes autistes de haut niveau, Peter Vermeulen, 2013, Dunod 



Une méta-analyse sur les fonctions exécutives chez les personnes autistes

Cet article est le résumé d’une méta analyse portant sur les fonctions exécutives chez les personnes autistes, dont vous trouverez les références complètes en bas de page.

L’autisme se caractérise par des comportements répétitifs et restreints ainsi que des difficultés dans la communication et les interactions sociales.

Les fonctions exécutives sont étudiées depuis longtemps
étant donné leur implication dans divers domaines comme la théorie de l’esprit,
les difficultés sociales, les comportements répétitifs et toutes les incidences
que cela peut avoir sur la vie quotidienne.

Les fonctions exécutives englobent les domaines
neuropsychologiques d’ordre supérieur, comme le fait d’orienter son
comportement vers un objectif, le raisonnement abstrait, la prise de décision,
la régulation sociale ainsi que d’autres processus exécutifs préfrontaux qui
intègrent les circuits émotionnels et sociaux.

Au niveau de la structure du cerveau, des différences ont
été observées.

Pour les personnes autistes, des anomalies ont été observées
dans le volume et l’épaisseur à la fois dans les régions cérébrales frontales et
corticales. Des différences ont également été observées au niveau de la
connectivité du réseau entre les régions préfrontales, corticales et
subcorticales.

Les objectifs de cette méta-analyse sont multiples :

  1. Examiner les preuves d’un dysfonctionnement des
    fonctions exécutives chez les personnes autistes, y compris la contribution
    individuelle des sous-domaines des fonctions exécutives;
  2. Évaluer l’influence des variables modératrices
    (âge, sexe, QI, type de diagnostic…) sur la base des caractéristiques de
    l’échantillon ou de la tâche;
  3. Examiner la sensibilité clinique des mesures
    individuelles des fonctions exécutives

En médecine, la sensibilité d’un test diagnostic est ainsi
sa capacité à détecter tous les malades (c’est-à-dire à avoir le moins de faux
négatifs), tandis que la spécificité de ce test est sa capacité à ne détecter
que les malades (avoir le moins de faux positifs). Source : Wikipédia

Méthode de traitement des données

Toutes les études incluent dans la méta analyse sont issues
de revues scientifiques ayant un comité de lecture et de langue anglaise. Les
publications ont été sélectionnées entre 1980 et juin 2016. Toutes ces études
incluaient des participants avec un diagnostic d’autisme posé selon les
critères internationaux (DSM ou CIM) et/ou réalisé avec des outils validés
(notamment ADOS et ADI).

Les études évaluent 6 sous domaines clés des fonctions
exécutives :

  • la formation de concept,
  • la flexibilité mentale,
  • la fluidité,
  • la planification,
  • l’inhibition de la réponse,
  • la mémoire de travail.

Ces domaines des fonctions exécutives ont été retenus car ils ont été largement étudiés dans la littérature sur l’autisme.

La plupart des études qui utilisent les questionnaire auto-administrés ont privilégié le test Behavioural Rating Inventory of Executive Function (BRIEF).

Les chercheurs étudient l’hypothèse selon laquelle l’ensemble des domaines des fonctions exécutives (FE) seraient altérées chez les personnes autistes.

Stratégie de recherche et étude des variables

Cette recherche est une méta-analyse.

Une méta-analyse est une méthode scientifique systématique combinant les résultats d’une série d’études indépendantes sur un problème donné, selon un protocole reproductible. La méta-analyse permet une analyse plus précise des données par l’augmentation du nombre de cas étudiés et de tirer une conclusion globale (source : Wikipédia).

La recherche documentaire a été effectuée sur les bases de
données informatisées de Medline, Embase et PsycINFO en utilisant des critères
de recherche basés sur les domaines des FE et des mesures d’intérêt.

Elle étudie différentes variables modératrices pour voir si
les résultats aux tests effectués pour mesurer les fonctions exécutives varient
selon les critères suivants :

Âge. Une approche stratifiée a été utilisée pour classer chaque étude dans l’une des catégories d’âges suivantes: enfants de moins de 12 ans, Jeunes de 12 à18 ans, Adultes de plus de 18 ans, Age mixte de moins de 18 ans et âge mixte.

Le sexe homme ou femme. Une comparaison entre des études incluant uniquement des participants de sexe féminin ou masculin.

Groupe de diagnostic. Les participants ont été regroupés en fonction de leur classification d’études (diagnostic de l’autisme, Asperger ou Trouble du Spectre de l’Autisme combinés (en combinant au moins deux des classifications ci-dessus).

Type de contrôle. Une comparaison entre des études utilisant des contrôles neurotypiques par rapport à des contrôles frères et soeurs.

Outil de diagnostic. Les études ont été classées en fonction des outils d’évaluation utilisés pour le diagnostic. Ceux-ci peuvent avoir inclus un ou plusieurs des éléments suivants: DSM, CIM, ADOS et ADI.

Exemple de critères de correspondance. Comparaison entre des études utilisant un ou plusieurs critères de comparaison pour la sélection d’un échantillon.

Différences de QI. Une comparaison est faite pour savoir si une différence significative de QI a été observée entre les groupes d’étude.

Format de l’outil d’évaluation. Une comparaison entre ordinateur et administration traditionnelle d’évaluations.

Mode de traitement du stimulus. Une comparaison basée sur les caractéristiques de présentation des stimuli de test, verbaux et non verbaux.

Mode de réponse. Une comparaison basée sur le mode de réponse requis des participants, verbal et moteur.

Résultats de la recherche portant sur les fonctions exécutives

235 études correspondaient aux critères de sélection de
cette méta analyse sur les fonctions exécutives avec un total de 14 081
participants (personnes autistes = 6816 et personnes contrôles = 7265).

La méta-analyse a extrait toutes les données concernant les fonctions exécutives depuis l’introduction de l’autisme en tant que diagnostic psychiatrique et a mis en évidence de manière cohérente la présence d’un effet globalement modéré de la dysfonction exécutive chez les personnes autistes. Les personnes ayant eu un diagnostic d’autisme ont présenté une performance moyenne plus mauvaise aux fonctions exécutives par rapport aux témoins neurotypiques.

Réponse à l’hypothèse
1:
Examiner les preuves d’un dysfonctionnement des fonctions exécutives
chez les personnes autistes, y compris la contribution individuelle des
sous-domaines des fonctions exécutives.

Pour rappel, les 6 sous domaines des FE étudiés sont les suivants : la formation de concept, la flexibilité mentale, la fluidité, la planification, l’inhibition de la réponse, la mémoire de travail.

Aucune différence significative dans la taille d’effet n’a été observée entre ceux-ci. Des tailles d’effet modérées ont été observées pour tous les sous-domaines étudiés autrement dit il y a peu de différences entre les sous domaines des fonctions exécutives. Ces résultats suggèrent qu’il existe une relative équivalence des altérations des fonctions exécutives chez les personnes autistes parmi les constructions qui ont été examinées. Ceci a été conforté dans la présente étude par l’impact largement homogène de la plupart des modérateurs sur les résultats des fonctions exécutives.

Une déficience globale due à une sous-connectivité ou à une
sur-connectivité entre les réseaux cérébraux contribuant largement aux
fonctions exécutives, par opposition à des déficits anatomiques discrets,
pourrait expliquer l’absence de différences entre les sous-domaines des
fonctions exécutives.

Réponse à l’hypothèse 2 : Évaluer l’influence des variables modératrices (âge, sexe, QI, type de diagnostic…) sur la base des caractéristiques de l’échantillon ou de la tâche.

La majorité des comparaisons de modérateurs n’étaient pas significatives. La différence la plus importante a été trouvé au niveau de l’âge.

Les tailles d’effet généralement plus faibles observées chez
les adultes autistes au niveau des fonctions exécutives soutiennent d’autres
recherches selon lesquelles, en raison de la maturité développementale et / ou
de l’utilisation accrue de stratégies compensatoires, les adultes autistes obtiennent
de meilleurs résultats dans les FE que les groupes d’âge plus jeunes, alors qu’un
dysfonctionnement exécutif résiduel est toujours présent.

Une moindre différence entre les résultats aux tests qui
mesurent les fonctions exécutives a été observée entre les personnes contrôles
et les personnes autistes lorsqu’un seul outil de diagnostic est utilisé (ADOS
ou ADI). Étant donné la variabilité au sein du spectre et les recommandations
pour une évaluation multifactorielle, l’utilisation d’un seul outil de
diagnostic peut conduire à une cohorte moins sévère répondant à des critères
beaucoup plus larges du diagnostic d’autisme.

Les chercheurs ont émis l’hypothèse que les différentes
classifications diagnostiques des Troubles du Spectre de l’Autisme pourraient faire
varier les résultats des études sur les fonctions exécutives.

Cependant, les résultats n’ont pas permis de mettre en
évidence des différences de taille d’effet entre différents groupes de
diagnostic.

La taille d’effet la plus importante a été observée pour la
correspondance en fonction de l’âge chronologique. Les différences dans les
fonctions exécutives sont plus prononcées entre les groupes expérimentaux et
les groupes de comparaison appartenant au même groupe d’âge, si aucun autre modérateur
tel que le QI ou l’âge mental n’est pris en compte.

Réponse à l’hypothèse 3 : Examiner la sensibilité clinique des mesures individuelles des fonctions exécutives

L’étude montre qu’il y a un intérêt à évaluer les fonctions
exécutives en situation. Les mesures informatives telles que le BRIEF peuvent
offrir une plus grande utilité clinique, mais des investigations
supplémentaires sont nécessaires pour déterminer si les résultats représentent
une validité supérieure ou s’ils peuvent être influencés par la demande ou les
caractéristiques du déclarant.

En conclusion cette étude confirme l’existence d’un vaste dysfonctionnement exécutif chez les personnes autistes, relativement stable tout au long du développement.

L’ensemble de ces résultats suggèrent que les mesures de diagnostic et d’intervention doivent s’orienter vers un cadre plus valide sur le plan écologique et clinique tout en tenant compte des différences individuelles probables au sein du spectre.

La mise au point de mesures réalisables axées sur la sensibilité clinique pour les études de diagnostic et de traitement devrait être une priorité.

Les limites de cette étude sur les fonctions exécutives

Un certain nombre de limitations peuvent avoir influencé les
résultats de cette étude.

 Les questionnaires
auto-déclarés ou déclarés par les informateurs ont été exclus de la majorité
des analyses en raison des différences significatives entre les tailles d’effet
par rapport aux tests psychométriques et aux tâches expérimentales.

De plus, nous n’avons pas exploré l’impact de la variabilité
des différences intra-individuelles des personnes autistes sur les résultats
observés.

Certains facteurs d’influence des fonctions exécutives n’ont pas été étudiés comme la complexité des tâches effectuées, la sévérité des symptômes ou l’état émotionnel des participants, ainsi que les comorbidités (comme le TDA/H). L’anxiété notamment a été souvent associée à de moins bons résultats aux tests des fonctions exécutives chez les personnes autistes.


Référence :  Demetriou, E., Lampit, A., Quintana, D. et al. Autism spectrum disorders: a meta-analysis of executive function. Mol Psychiatry 23, 1198–1204 (2018)   



Les intérêts spécifiques

En attendant la parution d’un article plus détaillé sur ce sujet à la fin de la semaine, je vous propose déjà une très courte vidéo qui explique ce que sont les intérêts spécifiques et quelles fonctions ils occupent pour les personnes autistes.

[youtube https://www.youtube.com/watch?v=IbJvGjfNfNw?feature=oembed&w=1200&h=675]




Un profil type chez les personnes autistes selon les caractéristiques autistiques

Les caractéristiques de l’autisme se manifestent par des troubles de la communication et des interactions sociales ainsi que des comportements répétitifs et restreints.

Cette étude montre que les enfants autistes ont tendance à se situer plus dans l’une ou l’autre de ces caractéristiques et qu’un profil type chez les personnes autistes pourrait se dégager en fonction de cette catégorisation. Les résultats suggèrent que chacun de ces traits de l’autisme est hérité indépendamment.

Nous constatons que l’autisme est véritablement dimensionnel (…) Vous pouvez avoir deux personnes qui se présentent vraiment très différemment, mais sont malgré tout autistes.

Matthew Lerner, co-chercheur principal, professeur agrégé de psychologie, psychiatrie et pédiatrie à l’Université Stony Brook de New York

Les résultats de cette étude statistique correspondent à la
manière dont les professionnels observent l’autisme d’un point de vu clinique,
explique James McPartland, professeur associé en psychologie de l’enfant et
psychiatrie à l’université de Yale.

Vous devez comprendre [l’autisme] en terme de profil des forces et des vulnérabilités d’une personne, a déclaré.

McPartland 

Les chercheurs ont analysé les réponses des parents à un questionnaire comportant 12 items, le Child and Adolescent Symptom Inventory afin de voir s’il existait un profil type chez les personnes autistes. Il y a eu 3825 réponses concernant des enfants et adolescents âgés de 8 à 22 ans. Sur l’ensemble des participants, 1043 ont un diagnostic d’autisme. Les autres enfants et adolescents ont une déficience intellectuelle ou d’autres conditions psychiatriques.

L’équipe a ensuite ressemblé les réponses qui semblaient être de même nature. Par exemple ils ont mis dans la même catégorie les enfants et adolescents qui avaient une manière inhabituelle de se lier aux autres et ceux qui ont des difficultés à jouer avec les autres. Mais ils ont mis dans une autre catégorie les enfants qui parlaient d’une étrange manière, car ce comportement n’est pas de même nature que les difficultés précédemment évoquées. Un profil type chez les personnes autistes semble donc se dégager de cette étude.

L’analyse suggère que les traits d’une catégorie, tels que la communication, ont tendance à se regrouper plutôt qu’à ceux des deux autres catégories. Cette tendance est vraie pour l’autisme et pour d’autres conditions, y compris le trouble d’hyperactivité avec déficit de l’attention et les troubles d’apprentissage. Les chercheurs ont confirmé la tendance dans un autre groupe de 2 503 enfants référés pour des troubles psychiatriques.

Les difficultés de communication et les déficits sociaux des personnes autistes semblent liés mais distincts. Cette idée va à l’encontre des critères de diagnostic actuels, qui fusionnent les traits (Une version précédente du manuel de diagnostic les répertoriait séparément).

Sur le plan conceptuel, il peut être préférable de penser aux déficits de communication, bien qu’ils impliquent des interactions sociales, en tant que groupe distinct de caractéristiques de l’autisme.

déclare le co-chercheur principal Kenneth Gadow, professeur de psychiatrie et de santé comportementale à l’Université Stony Brook.

Cependant, d’autres experts sont en désaccord avec cette théorie. Les évaluations cliniques des personnes autistes suggèrent que ces deux catégories sont étroitement liées, explique Catherine Lord, professeure distinguée en psychiatrie et en éducation à l’Université de Californie à Los Angeles. (Lord était membre du groupe de travail qui a défini les critères de diagnostic actuels.)

Ces scores ne sont pas totalement indépendant, et c’est un des aspects les plus important de l’autisme.

Catherine Lord

D’autres disent que les résultats de l’étude sont limités
par les données. Le questionnaire est conçu pour détecter uniquement les trois
traits identifiés, ce qui rend l’analyse circulaire, explique Stephen Kanne,
professeur de neuropsychologie pédiatrique à l’Université du Missouri en
Colombie, qui n’a pas participé à l’étude.

L’étude parut dans le Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry a étudié la prévalence des Caractéristiques de Communication Atypiques (CCA). Une analyse de classe latente a été menée pour voir si les modèles de CCA donnaient des sous-groupes utiles sur le plan clinique chez les jeunes autistes.L’échantillon se compose de jeunes de 6 à 18 ans (N = 947; âge M = 11,41; hommes 72%; caucasiens 84%) avec et sans TSA.

Les résultats montrent que les enfants autistes sont plus
susceptibles d’avoir au moins une des 13 caractéristiques de communication
atypiques que les enfants ayant d’autres troubles. Ces caractéristiques
incluent la répétition de mots ou d’expressions, le bégaiement et l’inversion des
pronoms.

Les résultats suggèrent que l’existence d’un profil type chez les personnes autistes est une caractéristique importante du phénotype clinique des TSA et pourrait constituer un facteur utile pour définir plus précisément les caractéristiques de l’autisme.

Les chercheurs tentent d’utiliser l’approche statistique
pour identifier des sous-groupes d’enfants autistes.

Référence : Three spectrums, not one, may define autism, Jessica Wright / January 2019



L’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique

Cet article traite de l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique en détaillant ses manifestations chez les personnes autistes. C’est un résumé de la recherche suivante : Behavioral Symptoms of Reported Abuse in Children and Adolescents with Autism Spectrum Disorder in Inpatient Settings, dont vous trouverez les références complètes en bas de page.

Quelques notions sur l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique

Le taux élevé de maltraitance chez les enfants handicapés, spécialement chez les personnes autistes, montre la nécessité d’identifier et de traiter les symptômes liés aux traumatismes spécifiquement pour cette population très vulnérable.

Une étude de Sullivan and Knutson (2000) réalisée dans le Nebraska montre que les enfants handicapés ont deux fois plus de chance que les enfants de la population générale d’être maltraités. Une étude similaire, menée au niveau national dans les hôpitaux, montre que les enfants handicapés ont 1.8 fois plus de chance de subir de la négligence, 1.6 fois plus de chance de subir de la violence physique, et 2.2 fois plus de chance de subir des abus sexuels (Sullivan and Cork 1996).

Parmi les enfants handicapés, les enfants autistes représentent une population avec un risque accru selon une étude de Hall-Lande et al. (2015) qui montre que les enfants autistes ont trois à quatre fois plus de risque que les enfants avec d’autres handicaps d’être victimes de maltraitances.

En dépit de ces chiffres accablants, il n’existe aujourd’hui aucun outil spécifique pour la détection et le traitement des symptômes des enfants autistes victimes de maltraitance.

Il y a beaucoup de barrières à l’identification des symptômes traumatiques chez les personnes autistes. Tout d’abord, il y a un chevauchement des symptômes de l’autisme et ceux du Syndrome de Stress Post-Traumatique (SSPT) tels que définis dans le DSM-5. Par exemple les enfants souffrant d’un SSPT peuvent s’engager dans des comportements répétitifs, avoir des hypersensibilités sensorielles et avoir des difficultés d’interactions sociales, sans être autistes. Ils peuvent aussi souffrir de troubles du sommeil, et d’un repli sur soi. Tous ces éléments peuvent également être des caractéristiques de l’autisme, rendant complexe la distinction entre les deux pour les professionnels.

A cause des points communs entre l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique, les cliniciens rencontrent des difficultés à identifier le SSPT chez les enfants autistes. Ainsi, ils peuvent observer chez certains enfants autismes les caractéristiques du SSPT mais les attribuer aux caractéristiques classiques de l’autisme.

Plusieurs théories existent dans la littérature scientifique pour caractériser les réactions des personnes autistes face à un évènement traumatique :

  1. les personnes autistes seraient plus sensibles aux expériences traumatiques. Cela est du à leur manière de traiter l’information, à leur compréhension verbale, à leur système de régulation des émotions et à l’isolement sociale. Tout cela contribue à une plus grande expression des symptômes traumatiques chez les personnes autistes (Kerns et al. 2015; Mansell et al. 1998).
  2. une autre théorie développe l’inverse : les personnes autistes seraient moins sujettes à développer des symptômes traumatiques face à un évènement potentiellement traumatique. Cela est du à la difficulté pour les personnes autistes de reconnaitre leurs propres états mentaux intérieurs et à les connecter avec la réalité sociale. De ce fait ils seraient moins capables d’identifier un évènement comme étant traumatique (Kerns et al. 2015; Mansell et al. 1998; Mehtar and Mukaddes 2011).
  3. la dernière théorie soutien que les personnes autistes réagissent de la même manière que les personnes non autistes à un évènement traumatique (Cook et al. 1993; King and Desaulnier 2011; Mansell et al. 1998). Malheureusement il y a encore trop peu d’études réalisées pour explorer cette piste de recherche.

Présentation de l’étude l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique

L’objectif principal de cette recherche est de montrer comment les manifestations comportementales des enfants autistes victimes d’abus s’expriment.

L’étude a été menée au Royaume-Unis et les données ont été collectées grâce à un dispositif nommé Autism Inpatient Collection (AIC). Il existe de nombreuses formes de maltraitance, l’étude se concentre sur les abus physiques, sexuels et/ou émotionnels.

Plusieurs sous-objectifs ont été déterminés :

  1. identifier la prévalence de la maltraitance déclarée par les soignants et les symptômes du participant compatibles avec un diagnostic de SSPT dans l’ensemble de l’échantillon AIC
  2. identifier le type de maltraitance (physique, sexuelle, psychologique…)
  3. identifier le type et le degré de symptômes correspondant à un SSPT en comparant l’échantillon de personnes autistes ayant eu des abus et ceux n’ayant pas eu d’abus
  4. identifier les différences entre les personnes autistes victimes d’abus et celles qui n’ont pas eu d’abus dans les domaines de fonctionnement adaptatif, la sévérité des symptômes noyaux (= comportements répétitifs et restreints et troubles des interactions sociales), et la sévérité des troubles du comportement.

Etant donné qu’il existe peu de recherches sur l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique, ces objectifs ont une visée exploratoire.

Voici quelques caractéristiques de l’échantillon étudié pour l’étude sur l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique.

L’échantillon se compose de 350 enfants et adolescents autistes âgés de 4 à 21 ans recrutés dans six hôpitaux psychiatriques spécialisés qui font partis du dispositif AIC (Siegel et al. 2015).

Il y a 79 % d’hommes et 21 % de femmes, l’âge moyen des participants est de 12.9 ans. 79 % des enfants sont caucasiens. 42 % de l’échantillon à un QI inférieur à 70, qui est le seuil de la déficience intellectuelle.

Résultats et discussion de l’étude sur l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique

Sur les 350 enfants de l’échantillon, 99 soignants rapportent que les enfants ont été victimes d’abus.

Le groupe des enfants ayant été victime d’abus présente les caractéristiques suivantes : les enfants ont entre 4 et 21 ans avec une moyenne d’âge de 12.8. Il y a 21 % de filles et 79 % de garçons. Les caractéristiques de l’échantillon sont les mêmes que celles de la totalité de l’échantillon. 22 % des enfants ayant été abusés ont un faible niveau verbal.

Voici la typologie des abus dont ont été victimes les enfants, rapportés par les soignants : 13 % ont été victimes d’abus physiques, 12 % d’abus émotionnels, 8 % ont été victimes d’abus sexuels, 1 % a été victime d’abus sexuels et émotionnels, 1 % a été victime d’abus physiques et sexuels et 16 % ont été victimes d’abus physiques et émotionnels.

Sur les 99 enfants victimes d’abus, seuls 7 ont été diagnostiqués avec un SSPT.

La comparaison des deux groupes : ceux des enfants victimes d’abus et ceux qui n’ont pas été victimes d’abus, montre que les enfants victimes d’abus ont plus de pensées intrusives et de souvenirs pénibles, plus de perte d’intérêt, ils sont plus irritables et plus léthargiques.

Quand on compare les résultats du groupe des enfants victimes d’abus et ceux du sous groupe ayant un diagnostic effectif de SSPT ; on s’aperçoit que les enfants ayant un diagnostic de SSPT ont plus de pensées intrusives, plus de souvenirs perturbants, plus de peurs persistantes et plus de comportements colériques.

La comparaison des symptômes relevant du SSPT entre le groupe des enfants ayant été victimes d’abus et ceux n’ayant pas été victimes d’abus laisse à penser que l’autisme et le Syndrome de Stress Post Traumatique sont liés et que les enfants autistes sont susceptibles de développer des symptômes traumatiques suite à des abus (Cook et al. 1993; King and Desaulnier 2011; Mansell et al. 1998). Cependant il faudrait comparer ces résultats à ceux d’enfants au développement typique pour savoir si les enfants autistes sont davantage amenés à développer des symptômes traumatiques par rapport à la population générale.

Aussi, certains symptômes incluant la peur, la colère, l’irritabilité, les problèmes d’attention, les troubles du sommeil ne diffèrent pas de manière significative entre le groupe des enfants autistes victimes d’abus et ceux n’ayant pas été victimes d’abus car ils sont des symptômes communs de l’autisme (American Psychiatric Association 2013).

Les enfants autistes ayant un SSPT diagnostiqué sont plus irritables et léthargiques que les enfants autistes victimes d’abus mais n’ayant pas un diagnostic de SSPT. Cela montre qu’il y a bien une altération négative de l’humeur et de la cognition du fait du lien entre l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique. On pourrait alors penser que le SSPT exacerbe les symptômes autistiques, pourtant il n’y a pas de différence dans le noyau des symptômes autistiques entre l’échantillon des enfants autistes victimes d’abus et ceux n’ayant subi aucun abus.

Cette similarité des deux groupes quant à la gravité des symptômes TSA et à certains symptômes du SSPT pourrait avoir joué un rôle dans le faible taux de diagnostics de SSPT chez les personnes ayant des antécédents de violence rapportés.Sur les 99 enfants victimes de maltraitance déclarée par les soignants, seuls sept ont été diagnostiqués comme souffrant de stress post-traumatique par des équipes cliniques expertes. Les facteurs concurrents de la résilience et de la vulnérabilité ne sont pas bien compris chez les personnes atteintes de TSA en ce qui concerne la formation potentielle de symptômes de SSPT. Il se peut qu’une grande partie des enfants autistes victimes d’abus soient résilients face à leurs expériences traumatiques.

Il est aussi possible qu’un certain nombre d’enfants autistes victimes d’abus n’ait pas été diagnostiqué comme ayant un SSPT à cause des symptômes communs entre l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique.

Cela a pu pousser les cliniciens à s’appuyer sur des seuils de sévérité plus importants des symptômes de SSPT pour le groupe d’enfants victimes d’abus.

Une autre explication pourrait être que tous ces enfants autistes victimes d’abus ne rencontrent pas l’ensemble des critères de diagnostic pour un SSPT.

Il est aussi intéressant de regarder les résultats entre le groupe d’enfants abusés ayant un SSPT et ceux ayant été abusés et n’ayant pas de SSPT. Ceux avec un SSPT ont plus de comportements craintifs et de crises de colère. Cela pourrait signifier que ces signes en particulier sont des signaux d’alarme forts que les cliniciens devraient rechercher en priorité lors des diagnostics de SSPT chez les personnes autistes.

Les limites à cette étude sur l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique

Cette étude concernant les liens entre l’autisme et le Syndrome de Stress Post-Traumatique a plusieurs limites :

  • Les mesures n’ont pas été conçues pour collecter des informations spécifiques aux traumatismes, et les rapports d’abus et de symptomatologie signalés par le fournisseur de soins ne pouvaient être approfondis et clarifiés.
  • A cause des difficultés de communication des personnes autistes, il est probable que certaines personnes identifiées comme n’ayant pas subit d’abus appartiennent en fait à la catégorie des enfants autistes ayant subit un abus mais que ca n’ait pas été détecté par les soignants
  • Le fait de se baser sur les dires rapportés par les soignants peut générer un biais
  • Il aurait été intéressant de voir si certains symptômes de SSPT sont plus liés à certains types de traumatismes, mais l’échantillon était trop réduit pour procéder à ce type de comparaison (Par exemple est-ce que les abus physiques sont plus caractérisés par l’apparition de crises de violence que les autres types de traumatismes).

Pour aller plus loin dans cette étude, il serait intéressant de comparer un échantillon de personnes autistes avec un passif de maltraitance et un échantillon de personnes au développement typique ayant un passé de maltraitance afin d’analyser les ressemblances et les différences entre les deux populations.


Source : Brenner, J., Pan, Z., Mazefsky, C. et al. J Autism Dev Disord (2018) 48: 3727. https://doi.org/10.1007/s10803-017-3183-4