Les mutations liées à l’autisme modifient l’équilibre des bactéries intestinales

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Ce texte est la traduction d’un article paru dans Spectrum News « Autism mutation alters balance of gut bacteria in mice », Jessica Wright, juin 2018

Une nouvelle étude (1) montre que les souris avec une mutation dans un gène de l’autisme supérieur appelé SHANK 3 ont un niveau élevé d’altération de certaines bactéries intestinales.

Nourrir les souris avec Lactobacillus reuteri, un microbe trouvé dans le yaourt et les probiotiques (note personnelle extraite de wikipédia : les probiotiques sont des micro-organismes vivants, bactéries ou levures, qui, ajoutés comme compléments à certains produits alimentaires comme les yaourts ou les céréales, et ingérés en quantité adéquate, sont censés conférer un bénéfice en matière de santé à l’hôte sain) soulage certains de leurs problèmes.

Les premières preuves suggèrent que les personnes autistes ont aussi un microbiote intestinal modifié – la collection de bactéries dans leurs intestins. Une petite étude publiée l’année dernière fait allusion au fait que l’utilisation d’une transplantation de bactérie chez les enfants autistes peut soulager leurs malaises digestifs  et même leurs difficultés sociales.

Les nouveaux résultats offrent des preuves toutes fraiches pour soutenir cette idée. Ils révèlent aussi une connexion entre les gènes de l’autisme et la flore intestinale.

Je pense que c’est important de prendre du recul et de regarder comment la génétique de l’autisme elle-même pourrait peut-être changer le microbiote

 

dit le chercheur en chef Evan Elliott, professeur assistant en neurosciences comportementales et moléculaires à l’université de Bar-Ilan en Israël.

Le travail fait aussi allusion à une explication de la manière dont les bactéries affectent le comportement : au travers d’un message chimique appelé acide gamma-aminobutyric (GABA)

L’étude est remarquable, car elle lie les facteurs génétiques et environnementaux de l’autisme, dit Sarkis Mazmanian, professeur de microbiologie à l’Institut Californien de Technologie à Pasadena, qui n’était pas impliqué dans l’étude.

 

Le repas microbien

La mutation SHANK3 est présente chez environ 2 % des personnes autistes. Elliott et ses collègues ont observé les échantillons de selles de 31 souris avec une mutation SHANK3 et 27 souris contrôles.

Les chercheurs ont découvert que les souris mutantes avaient une diversité moins importante dans leur microbiote que celles de l’échantillon contrôle.

Certaines souris avaient une absence complète de certaines espèces de bactéries, et un niveau plus faible d’autres bactéries, incluant L. reuteri.  Les niveaux de deux espèces de bactéries, provenant du gène Veillonella, sont aussi anormalement bas chez les femelles mutantes, et une d’elles est anormalement abondante chez les mâles mutants.

Une étude de 2016 a trouvé que L. reuteri restaure le comportement social chez les souris nées avec un microbiote déséquilibré.

Dans la nouvelle étude, L. reuteri stimule également l’intérêt des souris mâles – mais pas l’intérêt des femelles, auprès des autres souris

Nourrir les souris mutantes avec la bactérie diminue aussi le nombre de billes qu’elles enterrent – un test des comportements répétitifs et restreints des souris.

Pour autant, la pertinence de ces résultats pour les personnes autistes n’est pas claire, dit Jil Silverman, professeure associée de psychiatrie et de sciences du comportement à l’université de Californie, au David MIND Institute, qui n’était pas impliquée dans la recherche. Les mutants sont généralement lents, ce qui peut fausser les résultats des tests, dit-elle.

La recherche est parue le 19 mai dans Brain Behavior and Immunity.

 

Une connexion chimique

Les chercheurs ont aussi enquêté sur la manière dont la bactérie pourrait affecter le comportement. Une étude de 2011 a signalé que nourrir les souris avec une autre espèce de Lactobacillus modifie dans le cerveau l’expression du récepteur pour GABA2 (2). La bactérie sécrète des molécules grasses avec une structure chimique similaire à celle de GABA, et cela peut modifier l’expression des récepteurs au travers une boucle de retour, dit Elliott.

L’équipe d’Elliott a exploré plus loin les connexions GABA, mesurant les niveaux de L. reuteri et l’expression des récepteurs GABA du cerveau chez les mutants.

Ils ont découvert que les niveaux de bactéries intestinales suivaient ceux de trois types de récepteurs GABA dans le cerveau. Nourrir les souris avec L. reuteri augmente l’expression de l’ensemble des trois types de récepteurs.

SHANK3 est exprimé dans les neurones de l’intestin et pourrait altérer le microbiome au travers de ces neurones, dit Elliott. Alternativement, cela peut modifier les niveaux de certaines hormones qui affectent l’intestin.

Elliott et ses collègues évaluent la diversité microbienne dans les intestins des personnes autistes qui portaient certaines mutations.

 

REFERENCES:

  1. Tabouy L. et al. Brain Behav. Immun. Epub ahead of print (2018) PubMed
  2. Bravo J.A. et al. Proc. Natl. Acad. Sci. USA 108, 16050-16055 (2011) PubMed

Cette publication a un commentaire

  1. Jacques Thomé

    trés interessant

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